07/04/2010

Bad Lieutenant : escale à la Nouvelle-Orléans (Werner Herzog, 2009)

Vu comme ça, il n’y a pas de lien explicite entre le Bad Lieutenant de Herzog et celui de Ferrara. Hormis leur personnage commun de flic junkie, les deux films n’ont pas la même saveur, la même esthétique, ni les mêmes préoccupations. Jour et nuit. Et cela n’a rien de malheureux, c’est en fait ce qu’il y a de plus sain dans la version de Herzog. Pourtant, quand sur l’affiche Nicolas Cage s’avance pour reprendre l’uniforme de rebut, de fortes suspiZions trainent dans les esprits. Elles seront sans fondements : Bad Lieutenant est un vrai film, pas une sortie technique. Loin de New York, c’est à la Nouvelle-Orléans post-Katrina que le flic vicié trouve une enquête à résoudre. Une famille Noire massacrée, dont le père était dealer. Dès la première scène, les enjeux sont opaques, comme amoindris, mis à distance par la coke. Cage se défonce dès qu’il le peut et le film avance - sans jamais tomber dans des délires imbuvables - en tableaux presque cloisonnés, délimités par chaque prise de stupéfiants. A chaque fois, comme si une règle avait été fixée, quelque chose s’en échappe : une atmosphère moite, un élément d’enquête, une discussion à la dérive, une hallucination virale. La grande force du Bad Lieutenant de Herzog, c’est justement cet entrelacs de simples scènes, tout à fait appréciables sans les contraintes d'un "grand projet". A ce titre, le sous-texte chrétien présent chez Ferrara (son "grand projet") a été éjecté. Reste le polar pur et son goût pour les personnages déglingués, les pieds qui traînent dans les rues, les costumes beiges qui suintent, les peintures écaillées et le blues imprégné. Détails qui foisonnent et que la caméra capte de manière vaste. Quand l'enquête se précise davantage, on la suit avec tout l'intérêt requis. Mais cette variation de Bad Lieutenant reste fondamentalement un film d'atmosphère. Quelque chose qui ne se raconte pas, qui ne passionne jamais totalement. Mais qui impose ses teintes et ses codes avec un sens du singulier. Puis, Nicolas Cage n'a pas été aussi bon depuis 5 ans, pour être gentil.

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